Le 17 novembre 2022, Convergences, en collaboration avec l’incubateur 104factory, a co-organisé le sixième meet-up du programme Culture Impact de l’incubateur. Ce programme est le laboratoire de la transition écologique au service de la culture pour repenser les usages et favoriser les innovations afin de réduire l’empreinte écologique du secteur culturel.
Réuni·e·s dans le salon du 104factory, une vingtaine de personnes ont pu échanger et interroger le concept d’entreprise à impact avec un panel d’intervenant·e·s aux visions complémentaires :
L’article ci-dessous est un extrait des échanges du meet-up que vous pouvez retrouver en intégralité en écoutant le podcast.
Qu’est-ce qu’une entreprise à impact ?
A ce jour, il n’existe aucune définition formelle de l’entreprise à impact. D’après la Bpi France, les entreprises à impact adoptent des pratiques à l’impact social et environnemental positif en les inscrivant au cœur de leur modèle économique. Ces mesures peuvent aller de la mise en place d’une stratégie bas carbone jusqu’à l’intégration des salarié·e·s dans la gouvernance de l’organisation, en passant par l’utilisation de l’économie circulaire ou des politiques de recrutement inclusives.
Penser son entreprise à impact par rapport à son environnement
Nous habitons sur une surface finie que nous pensons illimitée en taille et en ressources. Morgan Moinet fait partie de celles et ceux qui essayent de construire une activité qui se base sur les ressources déjà existantes et présentes dans la ville et en minimisant leur utilisation. Il aborde l’entreprise non pas comme une fin en soi mais comme une boîte à outils qui permet d’atteindre des objectifs. Son ambition entrepreneuriale est d’aider le secteur du bâtiment à réduire son empreinte environnementale et à apprendre à construire d’une manière plus durable. Il relève néanmoins des paradoxes : son entreprise est-elle à l’échelle de l’ampleur de l’enjeu ? Créer une entreprise n’est-il pas une solution contre-productive dans un monde où la recherche de croissance semble avoir fait son temps ?
Morgan Moinet est Directeur général de REMIX, bureau d’études. Cet entrepreneur est accompagné par 104factory et œuvre au développement des pratiques de réemploi des matériaux de construction du secteur du bâtiment.
Se faire accompagner pour créer et valoriser ses impacts
Elsa da Costa Grangier voit l’impact comme un choc qui provoque un changement. Certaines entreprises veulent limiter leur impact lorsque d’autres veulent le maximiser. Comment parler d’impact ? Ashoka part du concept d’utilité pour définir l’impact. Ce choix permet de refléter l’intentionnalité mise dans les actions réalisées par les entrepreneur·e·s. Dans un monde fini, nous avons tendance à accentuer les inégalités et le dysfonctionnement du système. Les meilleures réponses sont portées par les personnes qui cherchent des solutions inclusives et durables face aux problèmes de société et Ashoka est là pour les soutenir dans cette démarche. Pour faire partie de l’écosystème d’Ashoka, il faut ainsi répondre à cinq critères fondamentaux : avoir une fibre entrepreneuriale, développer une solution novatrice, être créatif·ve, mettre l’éthique au cœur de son projet et adopter une approche systémique du changement. Ces critères stricts permettent de soutenir des activités sérieuses et impactantes pour la société.
Elsa da Costa Grangier est Directrice générale d’Ashoka France, branche nationale de la plus grande communauté d’acteurs et actrices de changement qui agissent en faveur de l’innovation sociale depuis 1981. L’ONG vise à accélérer les idées et initiatives associatives ayant un impact sociétal positif.
Répondre à la tension entre impacts sociaux et environnementaux et enjeux économiques
En 2010, l’objectif de la fondatrice de Gobi, Florence Baitinger, était de créer une entreprise avec une utilité. Mais lorsque l’on cherche à avoir de l’impact, plusieurs questions apparaissent : à quel besoin mon projet répond-t-il ? Quel en serait son usage ? Comment le concevoir et où le produire ? Partant du constat que tout le monde a et aura toujours besoin de boire de l’eau, l’idée est venue de créer une solution durable aux gobelets et bouteilles en plastique. A cela s’ajoute le défi d’avoir un impact aussi sur les comportements de consommation en promouvant une alternative aux pratiques d’hydratation répandues. En tant qu’entrepreneur·e, il fallait également trouver le bon modèle économique rentable qui permet de vivre de son activité tout en maintenant ses objectifs d’impact. Gobi a donc fait le choix de l’éco-conception préventive, avec un calcul préalable du coût pour la planète d’une année d’hydratation de la population. Une évidence est ensuite venue : produire en France et avec des entreprises d’insertion les gourdes pour aller au bout de la démarche. Cela permet de créer de la valeur économique locale, pour des personnes loin de l’emploi tout en agissant le plus sobrement possible. C’est la définition concrète et quotidienne de l’impact selon Gobi.
Florence Baitinger est la Co-fondatrice et Présidente de Gobi, une entreprise à impact qui participe, à son échelle, à la réduction des déchets en proposant des alternatives aux gobelets jetables telles que des gourdes françaises éco-conçues depuis 2010.
Mesurer ses impacts pour s’améliorer
Identifier et mesurer les impacts des activités d’une entreprise est au centre du projet de B Corp depuis 2006. La certification B Corp a été créée par des entrepreneurs qui avaient intégré des valeurs sociétales et environnementales dans leur projet mais qui ont fait faillite face à la concurrence de grands groupes peu regardants sur ces enjeux. L’objectif était donc double : accompagner les entreprises vers un modèle plus responsable et le faire reconnaître comme primordial pour leurs partenaires et client·e·s. La certification, accessible que pour des structures à but lucratif, prend en compte pour cela plusieurs paramètres, actualisés et enrichis régulièrement, qui garantissent l’engagement des entreprises. Par exemple, un des critères pour obtenir la certification est l’inscription dans les statuts de l’entreprise de la volonté de prendre en compte les différents impacts de l’activité auprès de toutes ses parties prenantes : sa gouvernance, ses collaborateur·trice·s, ses client·e·s, ses fournisseur·se·s, son environnement et la collectivité. La vision de l’entreprise à impact, derrière ce label, est celle d’une entreprise qui se pose les bonnes questions et qui prend des décisions en conséquence avec une vision long-termiste, régénératrice des ressources et incluant toutes les parties prenantes.
Mathilde Fermaut est Responsable Certification et Pédagogie de Blab France, association représentant de la voix BCorp en France, dont le rôle est de développer et d’animer la communauté des entreprises certifiées BCorp.
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