Il y a 2 ans, Ging Ledesma (Directrice Performance Sociale et Relations avec les Investisseurs d’Oikocredit), a commenté dans ce Baromètre les résultats de l’enquête 2014 sur l’application des Normes Universelles pour la Gestion de la Performance Sociale (NUGPS). Elle souligna que malgré une prise de conscience généralisée au sein du secteur, il demeurait un manque de rigueur dans la collecte et le reporting de données pertinentes concernant les clients, et ce, pour la plupart des objectifs sociaux des institutions de microfinance (IMF)[1].

Elle a ensuite succinctement présenté une initiative de renforcement des capacités mise en place par Oikocredit en partenariat avec des IMF en Asie et en Amérique Latine : le Client Outcomes Programme (programme d’aide à la mesure d’impact sur la vie des clients). Ce programme comprend 2 piliers : le premier propose un soutien à la formation des IMF partenaires pour définir les indicateurs, améliorer la collecte des données sur les clients, analyser et établir des rapports, et adapter la gestion des systèmes d’information. Le second pilier comprend des travaux de recherche approfondis sur les effets de la microfinance sur les conditions de vie des emprunteurs.

Le but de ce programme est clair : analyser les changements au niveau des clients des IMF grâce à une gestion durable de données homogènes en utilisant, par exemple, des outils tels que l’Indice de sortie de la pauvreté (PPI). Après plusieurs années d’existence du Client Outcomes Programme, nous sommes en mesure de tirer des conclusions prudentes mais positives de cette expérience.

Le programme s’est élargi, passant de 4 IMF partenaires à 17 IMF début 2017, regroupant plus d’1,4 millions de clients finaux. L’équipe de gestion de la performance sociale d’Oikocredit a effectué des analyses économétriques des données provenant d’un échantillon de 600 000 clients de plusieurs institutions partenaires, y compris ASKI aux Philippines[2]. L’une des conclusions était que le pourcentage des emprunteurs d’ASKI vivant en dessous des seuils de pauvreté internationaux (avec moins de 1,25/2,5/3,75 dollars par jour) avait légèrement diminué entre 2010 et 2014.

Pouvons-nous aujourd’hui affirmer hardiment que le microcrédit a un effet positif et universel sur la réduction de la pauvreté ? Certes non, mais nous pouvons dire que le microcrédit a eu un effet mince mais significativement positif. Plus d’analyses, ainsi qu’une plus large collecte de données sont souhaitables. Le Client Outcomes Programme nous a toutefois appris que l’engagement des IMF en faveur de meilleures collectes, analyses et utilisations des données des clients comporte en soi un effet positif dans leurs opérations. Dans le cas d’ASKI, la création d’un tableau de bord permanent mesurant la pauvreté a permis d’augmenté le degré de sensibilisation et les pratiques centrées sur le client et cela s’observe à différents niveaux au sein de l’organisation (management, audit interne, agences locales…).

Le suivi et l’analyse, non seulement des produits mais également des résultats, constituent un processus de transformation patient et qui devrait impliquer tous les acteurs, investisseurs et opérateurs du secteur de la microfinance. Et, dans l’intérêt des bénéficiaires à bas revenus, nous devrions tous rester humbles et continuer à redoubler d’efforts.

Gaël Marteau
Directeur France
Oikocredit

 

[1] Social Performance Task Force, Les Normes Universelles de Gestion de la Performance Sociale, http://www.sptf.info/spmstandards/universal-standards, Norme 1.B.

[2]  « Effects of microcredit on the poverty of borrowers using the PPI : Evidence from 2 Asian MFIs » (Jain, Gravesteijn, Hoepner, 2015). Available at : https://www.oikocredit.coop/l/library/download/urn:uuid:4503cd8f-8e75-4037-8828-f3253581251d/clientoutcomesppt11-12-2015.pdf

 

Cet article est tiré du Baromètre de la Microfinance 2017 téléchargeable ici.

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